Accord des Etats sur le Paquet Climat "Ajustement à l'objectif 55"
A l’image de la précédente Présidence française parvenue à conclure le paquet Climat-Energie en décembre 2008, la PFUE de 2022 est parvenue fin juin à un accord des Etats membres sur le paquet Climat "Fit for 55", portant sur un nouveau marché carbone européen, renforcé et élargi aux bâtiments et aux transports, sur la protection des forêts et sur un Fonds social palliant ces évolutions.
La guerre russo-ukrainienne a accéléré la prise de conscience de plusieurs Etats: l’UE est fortement dépendante d’énergies fossiles qu’elle ne produit presque plus, et doit changer rapidement de trajectoire.
Ce "paquet" de dix mesures marque des avancées importantes en termes de consommation énergétique (et partant, d’émissions de CO2), en particulier dans le secteur des transports, de l’industrie, et de l’agriculture et des forêts. Ainsi le règlement approuvé sur les véhicules (voitures particulières, véhicules utilitaires et camionnettes) prévoit dès 2035, la fin de la commercialisation des véhicules essence et diesel traditionnels, les véhicules à moteur thermique pouvant continuer à être vendus si le carburant utilisé est "neutre" en carbone. Cette avancée est appuyée par l’accord sur le règlement sur le déploiement des infrastructures pour les carburants alternatifs (AFIR), qui projette le déploiement des infrastructures de recharge le long des corridors du réseau transeuropéen de transports (RTE-T), puis d’ici 2030 sur l’intégralité du RTE-T (son réseau global).
Par ailleurs le Conseil a avalisé le principe d’un marché carbone (ETS) "bâtiments/transports" pour les distributeurs qui fournissent des carburants et combustibles destinés à la consommation dans les secteurs du transport routier et du bâtiment (chauffage et froid). Les transports maritime et aérien seront mieux inclus dans le marché carbone européen, les quotas gratuits de l'aviation progressivement diminués d'ici 2027, le marché carbone s'appliquant aux vols intra-européens, et les "carburants durables d’aviation" étant mis en avant. Les deux tiers du secteur maritime devraient être ciblés dans le marché européen, avec des mesures transitoires pour les petites îles, et les régions ultrapériphériques, la navigation hivernale et les trajets relevant d’une obligation de service public.
Le marché carbone (système européen de quotas d’émissions dit ETS) qui touche jusqu’à présent les grosses productions industrielles, subira lui-même trois évolutions majeures. D’une part la taxe aux frontières: le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), qui devrait exiger dès 2023 des certificats payants pour les produits importés par des entreprises de pays tiers, avec un bilan carbone supérieur aux normes européennes. D’autre part, la baisse progressive du nombre total de quotas déjà existants, et la disparition progressive des quotas gratuits. Enfin, les objectifs nationaux de réduction d’ici 2030 des émissions non couvertes par le marché carbone: dans le transport routier, le chauffage des bâtiments, l’agriculture, les petites installations industrielles et la gestion des déchets.
Les Etats sont parvenus à un accord sur le règlement sur l’utilisation des terres, et la gestion des forêts (dit LULUCF), avec l’objectif que le secteur absorbe 15% de plus de carbone qu’aujourd’hui, chaque État membre devant respecter un objectif national contraignant en 2030. Par-contre le Conseil a jugé prématuré d’y intégrer d’autres émissions comme le méthane.
Le Conseil a acté un objectif contraignant de 40% d'énergie produite à partir de sources renouvelables dans le bouquet énergétique de l’UE d'ici 2030 (au lieu de l'objectif actuel de 32%). Il a agréé aussi des sous-objectifs contraignants pour les biocarburants dans les transports de 4,4% en 2030, et de 2,6%, pour les carburants renouvelables d'origine non biologique (hydrogène ou dérivés). En matière d’économies d’énergie, il a adopté l’objectif contraignant de réduction de 36% pour la consommation finale d'énergie dans l’UE et de 39% pour la consommation d'énergie primaire d'ici 2030.
L’ensemble de ces mesures s’accompagne de fonds de soutien à l’énergie, l’innovation et la précarité énergétique. Le Conseil a validé le projet de nouveau Fonds social pour le climat pour soutenir les ménages, les microentreprises et les usagers des transports vulnérables. Il fera partie du budget de l'UE et sera alimenté par des recettes affectées externes jusqu'à un montant maximum de 59 Mrds €.
A l’exception des projets sur les infrastructures pour carburants alternatifs et sur les carburants marins durables, qui ne devraient être adoptés par le Parlement que le 10 octobre en commission des Transports, l’ensemble de ces compromis sera maintenant négocié au second semestre lors des "trilogues institutionnels" (réunions entre le Parlement, le Conseil et la Commission). Une première réunion le 11 juillet a montré des positions antagonistes sur le nouveau marché carbone, couvrant le chauffage des bâtiments et les transports. La réglementation finale devrait entrer en vigueur d’ici 2024.
Site de la Présidence du Conseil sur les négociations du paquet fit for 55